» Fleur d’Amour, Le Fado, Tout ça c’est pour vous, Moineau de Paris »… Ce furent, parmi bien d’autres, rengaines et refrains que l’on fredonna à la Belle époque, durant les Années folles, sous l’occupation jusqu’aux 30 glorieuses. Durant les trois quarts du siècle dernier, Jeanne Florentine Bourgeois dit Mistinguett fit chanter les quartiers populaires comme les endroits les plus chic.

Fille d’un travailleur journalier, et d’une, couturière, Jeanne Florentine Bourgeois naît à Enghien-les-Bains. La famille travaillant comme garde-barrière déménage, toujours près de Paris où elle passe toute son enfance.
S’enchainent cours de danse, de théâtre, de chant et de maintien… et des débuts prometteurs dès 1885. S’ensuit une rencontre déterminante avec Saint-Marcel, responsable de revue au Casino de Paris, qui l’engage pour le lever de rideau : le 5 décembre 1893, elle monte sur scène avec le trac, entonnant son air La Môme du Casino. Elle entre en 1894 au Trianon-Concert où elle lance Max, Ah c’que t’es rigolo, mais que le public ne trouve pas drôle du tout. De 1897 à 1907, elle se produit à l’Eldorado en tant que chanteuse comique. Après avoir appris à pallier son insuffisance vocale par un brin de comédie, une mimique unique, une voix gouailleuse et des pas de danse, elle en sort vedette consacrée. Le public commence à l’aimer.


« Un jour, j’ai rencontré un « auteur » qui m’a dit : – Toi, tu as le genre anglais, tu devrais t’appeler Miss… J’ai justement une chanson La Mistingo – ». Et c’est en chantant : Ô la Mistinguo, Ô la Mistinguette ! Qu’elle devient Miss Tinguette, puis Mistinguett.

Elle monte alors sur la scène du Moulin-Rouge, en 1907, dans « La Revue de la Femme ». Très vite, son talent éclate au grand jour. Elle crée « La Valse chaloupée », nouveau triomphe. Mistinguett fait preuve d’un sens indéniable de la repartie. Puis, ce sont La Revue, La Valse renversante avec Maurice Chevalier aux Folies Bergère en 1912, et le début d’une histoire d’amour longue de dix ans. En 1908, elle tourne son premier film L’Empreinte ou la Main rouge et, pendant quelques années, elle alterne pièces de théâtre, revues et films; des expériences qui forgeront le mythe « Mistinguett » tel qu’il demeurera jusqu’à la fin de sa longue carrière. Au cinéma, jusqu’en 1917, elle tournera dans de nombreux films muets. En tout, au cours d’un demi siècle, elle apparaîtra dans une cinquantaine de films.


Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, Maurice Chevalier est fait prisonnier en Allemagne. Voulant le faire libérer, elle se porte volontaire pour jouer les Mata Hari et récolte de nombreux renseignements auprès du Prince allemand de Hohenlohe ou du roi Victor-Emmanuel III en Italie. Elle parvient à faire libérer son amant en 1916 grâce à ses relations avec le roi d’Espagne.
En 1918, elle rejoint le Casino de Paris dont elle reste la vedette incontestée jusqu’en 1925, enchaîne les opérettes à succès : Paris qui danse, Paris qui jazz, En douce, Paris qui Brille!, Ça, c’est Paris. Durant cette période, aux côtés de Jean Gabin, de Georges Guétary et de bien d’autres célébrités de l’époque, elle devient alors la Miss des grandes revues qui feront accourir le Tout-Paris.
Elle fait trois grandes tournées sud-américaines avec la troupe du Bataclan et arrive le 16 juin 1923 à Buenos Aires où elle apparaît avec Maurice Chevalier. Elle est alors la vedette du grand bal d’ouverture du Copacabana Palace, à Rio de Janeiro.
Devenue une gloire nationale, elle chante Ça c’est Paris, Mon homme sur les paroles d’Albert Willemetz, qui écrit aussi pour elle de nombreuses chansons et revues pour les Folies Bergère et jusqu’aux États-Unis.


« C’est vrai… on dit que j’ai de belles gambettes » (faisant référence à ses jambes magnifiées par les plumes, les « plus belles jambes de Paris », qu’elle fait assurer pour 500 000 francs français en 1921), ces titres résonneront encore bien longtemps après sa mort en 1956. Deux spectacles-hommage lui seront rendus : en 2001, Mistinguett, la dernière revue de Jérôme Savary à l’Opéra Comique et de 2014 à 2016, Mistinguett, reine des années folles, spectacle musical d’Albert Cohen, au Casino de Paris.

 

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